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La commission Charbonneau a eu beau humilier bon nombre d'entrepreneurs chaque
jour durant plusieurs
mois, certains semblent
encore se croire
intouchables. La
tentative de corruption
déjouée à Châteauguay
remonte à septembre
2013, et c'est la
mairesse de la Ville
elle-même qui s'est
faite la dénonciatrice. C'est ce qu'a révélé le
commissaire de l'Unité
permanente
anticorruption (UPAC),
Robert Lafrenière, en
conférence de presse.
«Ce dossier revêt un caractère particulier et exceptionnel.
Nous avons
bénéficié
d'une
collaboration
rarissime,
mais
exemplaire
d'une élue
municipale. Elle n'a
rien à se
reprocher. Elle a
honorablement
dénoncé une
situation
intolérable
et nous l'en
félicitons»,
a raconté M.
Lafrenière. Il a ajouté
que des
mesures
avaient été
prises pour
protéger la
mairesse.
Des
entrepreneurs
et des
agents
immobiliers
auraient
entre autres
voulu
s'approprier
un poste
influent
dans
l'administration
municipale,
en retour de
sommes
d'argent «de
plusieurs
dizaines de
milliers de
dollars». Certains
auraient
aussi tenté
de faire
dézoner des
terrains en
retour
d'avantages,
pour la
construction
de projets
immobiliers.
Une opération a alors été mise en branle par l'UPAC. En collaboration avec les enquêteurs,
Nathalie Simon a feint d'accepter l'offre de Lafrance, afin de découvrir quelles étaient ses visées. Mais lorsqu'elle le rencontrait, elle l'enregistrait à son insu pour le compte de la police. L'UPAC avait aussi obtenu une requête d'un juge pour appliquer l'écoute électronique.
Lafrance lui explique rapidement qu'il veut qu'elle le nomme à un poste stratégique au sein de la municipalité. Il fait preuve d'une grande franchise, ne se cache pas, malgré toute la publicité médiatique qui entoure les activités de l'UPAC et les travaux de la commission Charbonneau à ce moment-là.
«René Lafrance voulait depuis fort longtemps être directeur du développement économique à la Ville de Châteauguay, et ce, pour diverses raisons obliques dont l'obtention d'avantages personnels et de cotes sur l'octroi de contrats», précise l'exposé des faits déposé en cour.
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Nathalie Simon, mairesse probe et honnête à la ville de Châteauguay, Région de la Montérégie |
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«Il faut lever notre
chapeau devant Mme Simon
aujourd'hui. Le geste
qu'elle a posé est très
courageux», a
mentionné le capitaine
André Boulanger, chef du
service des enquêtes sur
la corruption de l'UPAC,
en conférence de presse.
Il a précisé
que les
emplois
sollicités
en étaient
de haut
placés, et
les sommes
offertes,
importantes.
D'ailleurs,
lors des
perquisitions
dans quatre
résidences
de
Châteauguay,
31 000 $ ont
été saisis. Une
camionnette
considérée
comme un
produit de
la
criminalité
a aussi été
saisie chez
un des
suspects,
René
Lafrance.
Celui-ci est
un ancien
conseiller
municipal et
deux fois
candidat
défait à la
mairie de
Châteauguay.
Mais ce
n'est pas à
titre de
politicien
qu'il a été
arrêté. À la
suite de son
long passage
en politique
municipale
et scolaire,
René
Lafrance est
devenu
courtier
immobilier
pour une
agence basée
dans le
quartier LaSalle
à Montréal. Une
pancarte où
il pose
fièrement
trône
d'ailleurs à
quelques
mètres de sa
maison de la
rue de
Liège,
plantée
devant celle
de son
voisin qu'il
a été chargé
de vendre.
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René Lafrance
en campagne électorale |
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La proposition de René Lafrance |
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Il propose à Nathalie Simon 30 000$ pour lui
rembourser sa marge de crédit et 200 000$
pour financer sa prochaine campagne
électorale.
-
Il sera son homme de confiance, elle aura de
l'argent amassé «sans que ça passe par
elle», promet-il.
-
Elle devra en échange le nommer directeur du
développement économique. Elle n'aura pas à
savoir à qui il donnera les contrats
municipaux.
-
Il veut que sa fille Anick soit candidate
aux prochaines élections municipales dans le
district 1.
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Lafrance
est «foncièrement malhonnête»
Dans son jugement, le juge
Bertrand St-Arnaud (l'ex-ministre de la Justice du Québec) décrit M.
Lafrance comme une « grande gueule » dotée d'un « esprit tordu »,
« foncièrement malhonnête ».
« René Lafrance est en
effet assurément un magouilleur professionnel, directement sorti d'une autre
époque », dit-il.
« Il magouille sans cesse,
faisant constamment miroiter différentes choses aux uns et aux autres : des
sommes d'argent substantielles à la mairesse Simon; un poste au sein de
l'équipe Simon lors de la prochaine élection à sa fille et un emploi de
pompier au mari de cette dernière; des terrains à son fils », observe le
magistrat.
LES
COMPLICES
Jacques Roy,
71 ans, Longueuil : Militant libéral de longue date tant au
fédéral qu’au provincial. Il a été directeur du
développement économique de la ville de Châteauguay pendant
4 ans jusqu’en 2009, avant d’être remercié par la mairesse
Simon.
Par la suite, il a occupé sensiblement les mêmes
fonctions pour la ville de Saint-Constant, pendant deux ans.
Il a écopé de 15 mois de prison ferme.
( 01 ) |
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Michel
Bergevin,
45 ans, Mercier : Dirigeant de l’entreprise
Excavation Bergevin et Laberge. ( 02 )
Le juge sursoit au prononcé de la sentence et impose une probation de deux ans, des travaux communautaires (240 heures) ainsi que le versement de trois dons de 2 000 $ chacun à autant d'organismes de Châteauguay.
Sur écoute par les policiers Bergevin a été
entendu disant à René Lafrance qu'il souhaitait que la
mairesse « passe la résolution pour la vente de terrain »,
le tout « de gré à gré, bingo ! ». Les policiers
ont ensuite suivi les deux hommes. Bergevin a remis 31 000 $
en argent comptant à Lafrance. Ce dernier a remis l'argent à
la mairesse. Les policiers ont ensuite arrêté les deux
hommes. |
Éric
Lafrance, 38 ans, Châteauguay : c’est le fils de
René Lafrance. En plus d’être pompier, il est copropriétaire
de deux entreprises, soit le commerce Armoires Option, à
Châteauguay, et Les constructions Khéops inc. Les policiers
ont d’ailleurs perquisitionné au local d’Armoires
Option.
( 03 )
La Directrice des poursuites criminelles et pénales du
Québec a laissé tomber les accusations contre lui et nous ne
saurons jamais pourquoi. |
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Ils sont
tous
entrepreneurs
ou courtiers
immobiliers.
Ils ont été
amenés au
quartier
général de
la Sûreté du
Québec, à
Montréal,
pour être
interrogés.
Les 4
accusés
faisaient
face à 5
chefs
d'accusation
pour fraude
envers le
gouvernement,
abus de
confiance,
acte de
corruption
dans les
affaires
municipales
et complot.
Robert Lafrenière
s'est dit
étonné par
ce dossier
qui survient
en pleine
commission
Charbonneau
et alors que
le
gouvernement
resserre ses
lois pour
prévenir la
corruption.
«Ça
démontre que
la
corruption
existe
toujours, et
que la
collaboration
des élus est
cruciale. Il
y a des gens
qui pensent
que la
culture n'a
pas encore
changé.
C'est une
culture bien
incrustée
dans
beaucoup de
milieux.
Mais on
observe des
améliorations.
Mais il
reste des
gens qui
n'ont pas
compris. La
preuve,
c'est que ce
dossier ne
portait pas
sur des
gestes
commis en
2007 ou
2008, mais
en 2013»,
a martelé M.
Lafrenière.
"Quand on
voit un
dossier
contemporain
comme ça,
qui date de
trois mois,
(…) ça nous
dit qu'il
faut garder
la vigie et
être alerte",
a estimé le
commissaire.
Sources:
La Presse/Gesca pour Power Corporation
of Canada, Le Journal de Montréal pour
Québecor |
Choix de photos,
fusion de textes, mise en page,
références et titrage
par :
JosPublic
Mise à jour le 30 mars 2018 |
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