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Alors! C'est l'été et la baignade, ça va? Évidemment, je ne parle
pas de la pluie. Peut-être certains.nes se souviennent du temps où
nous allions en autobus et en procession nous baigner sur les plages
municipales. D’autres se souviendront des chalets déguingandés de nos
parents souvent pauvres, mais pour qui l’effort financier d’un court
séjour près d’un cours d’eau ou d’un lac était la récompense de
toute une année de labeur.
Les Chambres de commerce oeuvrant sur les rives des lacs et rivières ont entretenu le secret. Évitons de faire peur aux touristes disaient, par exemple, les propriétaires de camping de la baie Missisquoi en Montérégie. Vingt ans de silence de camouflage contre la honte verte, les marchands ont construit des piscines pour remplacer les lacs et faire croire aux familles que c’était la même chose. On peut appeler cela de l’arnaque: on invite la famille au bord de l’eau et ensuite on la balance à la piscine. Non, non, ce n’est pas à toutes les années! C’est une mauvaise période, vous avez été malchanceux, disaient-ils. Pas besoin d’ergoter longtemps pour comprendre que la quantité de touristes a décliné chaque année. Les politiciens eux ont écouté les marchands et, pour calmer quelques environnementalistes, ont subventionné les chercheurs pour étudier le phénomène ainsi que les groupes pour sauver les grenouilles, les tortues et faire de l’éducation. Va pour les amphibiens et autres, mais les humains eux ne voient toujours pas leur milieu aquatique s’améliorer. Déjà la lutte pour protéger l'eau des lacs avait eu ses heures de gloires de 1976 à 1990 grâce a Tony Le Sauteur et son organisation La FAPEL. Suite à la disparition de ce groupe, ce fut quelques groupes qui individuellement se démarquèrent et firent la lutte à la protection de l'eau. Mais sans financement et sans regroupement stratégique pour le faire, la tâche devenait de plus en plus difficile. Certains groupes parvinrent à continuer tels que le groupe du lac Massawippi dans les Cantons de l'Est. En 2003, Eau Secours! pris connaissance de l'histoire de la FAPEL et décidait de se lancer dans sa piste. Il fallait bien un jour que le ministère de l'environronnement cesse de tourner en rond et c’est grâce au courage de groupes en développement touristique et groupes environnementaux comme ceux de la baie Missisquoi, que la stratégie de la mise à vue fut lancée, notamment en 2005 par des conférences et un spectacle des Porteurs d’eau d’Eau Secours! à Venise-en-Québec. Devant cette action médiatique, voilà que le ministre de l’Environnement promet encore plus d’argent pour… la recherche.
Quel gâchis! La réplique d’Eau Secours! et ses groupes membres provoqua le débat public et pressa le gouvernement d'agir sensément.
Tout à coup s'insérèrent dans le débat sur la place publique
les firmes de communication lobbyistes d'associations et de
l'industries d’embarcations
nautiques motorisées, tels que Bombardier et autres fabricants de
grosses cylindrées ou de motomarines; des citoyens qui réclament une belle vue, la paix et de l’eau propre sur leur bord de lac; des villes qui souhaitent vendre dorénavant de plus petits terrains riverains, sans système d'égout municipal mais avec des fosses septiques pour augmenter leurs revenus fonciers; des comités de citoyens qui ne voulaient pas payer pour changer leurs vétustes installations septiques d'eaux usées; Première manche : 1 à 0 pour Eau Secours! et ses associations de lacs, le RAPPEL en Estrie, Conservation baie Missisquoi en Montérégie, la Fédération des lacs de Val-des-Monts en Outaouais, etc… des citoyens et citoyennes se sentant arnaqués par le ministère qui refusait de faire les tests appropriés. Le débat public se fait et le voile se lève sur les responsables de la situation. Deuxième manche : 1 à 1, le gouvernement calme le jeu en promettant des millions aux Comités de bassin versant et en disant vouloir augmenter le nombre d’inspecteurs. Troisième manche : 2 à 1 pour le gouvernement qui, avec ses partenaires, décide de ne plus publier la liste des lacs touchés. Le poids de la chape de plomb s’installe sur les épaules des bénévoles des groupes militants. Les médias se retirent du débat, car il manque de pugilistes, la matière première c'est-à-dire l'information se tarit. Eau Secours ! et ses groupes n'ont pas les finances pour jouer le rôle du ministère. Bien sûr, avec Société pour vaincre la pollution, on donne des cours pour que les riverains puisse prendre eux-mêmes les tests, mais c'est un coup d'épée dans l'eau.
Les préfets des villes
excommunient tous ceux qui ne pensent pas business. C’est en pleine saison touristique 2008 que la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l’eau – Eau Secours! dépose des demandes d’accès à l’information au ministère de l’Environnement et au Centre d'expertise en analyse environnementale du Québec, pour obtenir la liste des lacs touchés. Réponse timorée, attente vaine et tergiversation sans fin. Raison oblige puisque l’omerta riveraine est de mise et la Coalition n’a pu identifier que 16 milieux aquatiques touchés. La rumeur parle de 200. Il est plus que temps de savoir où sont les algues bleues (cyanobactéries), et de protéger la santé des touristes et leur investissement de vacances. En choisissant cette omerta cogitée, le gouvernement du Québec, Santé Publique Québec et les chambres de commerce du Québec arnaquent les touristes et s'exposent à des représailles économiques à plus ou moins long terme. N’ont-ils donc rien retenu de la fâcheuse expérience de la baie Missisquoi? Ayant choisi leur destination à l’avance et préparé la famille à des vacances bien méritées près de plan d’eau, ces vacanciers ont payé le gros prix pour des chalets loin de leur ville et ont investi de l’essence pour s’y rendre. Malheureusement, ce n’est qu’une fois sur place qu’ils seront informés de l’interdiction pour les résidents de s’approcher des algues bleues et, dans le doute, de s’abstenir de se baigner. Voilà des enfants déçus et un investissement, chèrement gagné, jeté à l’eau.
Au nom du profit, les commerçants sont prêts à mettre à risque les personnes non résidentes des lacs qui, elles, ne reçoivent pas les avis de la Santé publique. Par peur de conflits juridiques, le ministère refuse d’augmenter «réellement» le nombre d’inspecteurs qui permettraient de localiser et cerner la partie affectée du lac, au lieu d’annoncer la contamination générale.
Un bien fondé en
attire un autre, les interventions seraient plus efficaces et
profitables à plus court terme. Alors, comment savoir, si vous
demeurez à des lieux de la municipalité touchée, si le lac de votre
choix est propre à la baignade, ou simplement impropre même à la
planche à voile? À qui profite réellement ce mutisme et pour combien de temps encore? En 2009, la pression tombée, les souris dansent jusqu'à ce que le chat sorte du sac. Même là, il est sorti en 2017 et ce fut un pétard mouillé, le ministère n'a pas bougé le p'tit doigt et le 23 juillet 2019, la Société CBC/Radio-Canada a présenté un long et pertinent texte sur la question et toujours rien. Il me semble évident que comme d'habitude, dès que le ministère aura financé la recherche, on en entendra plus parler. Que voulez-vous, lorsque la population ne dit mot, le politicien et la politicienne n'écoutent que les lobbies d'intérêts privés et n'aller pas croire que l'on ne retrouve pas des scientifiques dans ce groupe. Cela se perpétuera jusqu'à ce que la baignade naturelle, sans produits toxiques comme le chlore, n'existe plus. Ce sera une grande perte pour les enfants qui n'auront pas connu ce genre de plaisir, ce sera aussi une grande perte lorsque les plus petits lacs deviendront des marécages complètement infestés d'algues nourries au phosphore des engrais de pelouse, d'agriculture, des eaux usées provenant des laveuses à vaisselles et à linge et surtout par l'indifférence généralisée. Le ministère de l'Environnement du Québec ne cesse de voir son budget amputé d'un parti politique à l'autre. À la prochaine campagne électorale, oseront-ils nous mentir encore? Agiront-ils intelligemment pour protéger notre environnement de vie. Rien ne va plus, mesdames, messieurs, faites vos jeux!
Ci-dessous: des textes en lien direct avec le sujet:
Pluies acides! Myriophylles à épi! Cyanobactéries! Les lacs du Québec on plus que jamais la vie dure, et depuis quelques années, les médias retentissent de hauts cris sur leur situation désespérée. On a aussi entendu clamer haut et fort un bien gros mensonge, en 2007, à l'occasion d'un premier Forum national sur les lacs endossé par Line Beauchamp, ministre du Développement durable: «pour la première fois au Québec, un Forum des lacs réunissait plus de 200 groupements» ! Pourtant de 1975 à 1991, pendant plus de 15 ans, la FAPEL a regroupé, annuellement, à son Congrès, jusqu'à 500 congressistes, représentant autant d'associations de lacs. Qui dit mieux! Il n'existe pas au Québec de regroupement de citoyens qui ait plus marqué le paysage de l'environnement que la FAPEL, la Fédération des associations pour la protection de l'environnement des lacs. Fondée en 1975 et formée d'associations préoccupées par la protection des lacs, la FAPEL avait pour mission d'épauler le Programme des lacs (1) dans ses contacts avec les villégiateurs et de protéger ce programme contre les menaces des politiciens et fonctionnaires qui, au fond, ne voulaient rien savoir d'un programme de participation des citoyens. À leurs yeux, un tel programme exige, par sa nature même, une approche spéciale qu'ils considéraient d'office comme allant à l'encontre des normes bureaucratiques de la Fonction publique. En 1976, les péquistes arrivaient au pouvoir et il était question de regrouper les forces de l'environnement au sein d'un véritable ministère. Or, il est coutume, au sein de la machine administrative gouvernementale, de profiter des grandes réformes pour barrer la route aux non conformistes. Les villégiateurs s'inquiétaient donc sérieusement de l'avenir du Programme des lacs, malgré les beaux discours de Marcel Léger, à qui le gouvernement avait confié le mandat d'organiser le futur ministère de l'Environnement et qui allait en devenir le premier titulaire.
Ce livre m'amène aussi à poser une question: pourquoi faut-il que les organisations volontaires qui épousent la cause de l'environnement aient à se battre contre le ministère du Développement durable pour protéger l'environnement ?
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