|
||||||||||||||||||||||||||
«Ça a valu la peine de se battre en Cour d’appel, mais je reste avec un sentiment de travail inachevé ce matin», exprime d’emblée Mme Spieser, le nez collé à la décision rendue par la Cour d’appel, vendredi après-midi le 17 janvier 2020. L’audience a eu lieu il y a plus d’un an et elle attendait la décision des juges avec impatience. Ce délai ne représente pourtant que le vingtième de la saga judiciaire. Vingt ans. Ce sont toutes ces années qu’elle a consacrées jusqu’à présent avec son ami Jean Bernier à défendre les victimes de la contamination de l’eau au TCE, ce dégraisseur à métal utilisé sur la base militaire de Valcartier. À première vue, les porteurs de voix du regroupement de citoyens se sont réjouis des gains qu’ont accordés les trois juges dans la cause. «D’emblée, hier quand on a regardé la décision on s’est dit wow. Il y a des choses qu’on a gagné et qui sont très importantes pour nous», raconte la dame qui est installée dans la municipalité depuis 1991. Plus de gens indemnisés, un plus grand territoire considéré comme étant contaminé et un dédommagement accordé aux résidents d’environ 700 unités d’habitation sur la base de Valcartier, la lutte se gagne pas à pas. «On est surtout heureux que les juges reconnaissent enfin que le gouvernement fédéral a été un très mauvais voisin, se réjouit Jean Bernier.
Gains insuffisants En prenant connaissance de l’arrêt prononcé, ils constatent que des éléments demeurent absents, et le déplorent. La durée d’indemnisation, fixée sur une période de cinq ans entre 1995 et 2000 demeure trop courte, selon eux. «On sait que l’exposition au produit a été beaucoup plus longue; l’usine d’armements roulait à son plein à la Deuxième Guerre mondiale», soutient Mme Spieser. Selon elle, le pire reste à venir, considérant que le TCE peut avoir des conséquences jusqu’à 30 ans suivant la dernière exposition. Les juges ont également rejeté le lien causal entre le TCE et les maladies occasionnées par le produit, un élément crucial pour le Regroupement des citoyens de Shannon. «En 2000, on déclarait déjà que le TCE était probablement cancérigène. Aujourd’hui, c’est mondialement prouvé; le TCE est cancérigène, se désole M. Bernier. Il faudrait que la Direction de la santé publique (DSP) de la région de la Capitale-Nationale ait enfin le courage de faire une vraie étude épidémiologique». D’autres années de débat ? C’est ainsi que, dans ces 185 pages du jugement rendu par la Cour d’appel, 20 ans d’histoire se soudent. Pour combien de temps? Ils ne le savent pas encore et entendent discuter avec leurs avocats à savoir s’ils donneront suite au dossier. Malgré des indemnisations qui pourraient représenter cinq fois le montant initial accordé par le précédent jugement de la Cour supérieure, ils continuent de penser aux personnes touchées pour leur donner l’énergie de continuer. «Je pense au-delà des montants. Je veux que les gens qui ont eu un cancer à Shannon parce qu’ils ont été contaminés au TCE soient indemnisés. C’est ça que je veux», martèle Mme Spieser, en énumérant avec émotion les victimes dans son entourage et celui de son ami. «Je n’arrive pas à fermer la porte et à me dire que j’ai terminé mon travail. C’est décevant parce que ça fait 20 ans, mais en même temps tous ces gens me poussent dans le dos et justifient mes actions», termine-t-elle. Au moment d’écrire ces lignes, 4 000 membres étaient inscrits au recours collectif intenté contre les autorités fédérales. Avec cette dernière décision rendue par la Cour d’appel, ils estiment toutefois que ce nombre devrait grimper à près de 10 000 membres.
Ci-dessous: des textes en lien direct avec le sujet:
|
|