Région de
Québec
Shannon : de l’eau
cancérigène, des gens
malades
|
«Ici,
la
maison
à
votre
gauche,
le
monsieur
est
mort
d'un
cancer,
sa
dame
aussi.
Ici,
à
votre
droite,
une
demoiselle
Vachon
a eu
un
cancer
du
côlon,
possiblement
un
cancer
du
cerveau
en
même
temps.
Le
père
est
mort
d'un
cancer
de
la
prostate,
jeune,
et
un
de
ses
fils
a eu
un
cancer
du
rein... ».
Celui
qui
parle
devant
les
caméras
de
l’émission
« Enquête »
de
Radio-Canada,
c’est
le
Dr.
Claude
Juneau,
médecin
à la
retraite,
qui
a
traité
les
gens
de
la
municipalité
de
Shannon
pendant
toute
sa
carrière.
«Si
les
autorités
n'avaient
pas
su
que
l'eau
était
contaminée,
on
aurait
pu
toujours
pardonner.
Mais
non
seulement
elles
le
savaient,
elles
n'ont
rien
fait
et
contestent
l'évidence!»
s'emporte-t-il.
Michel Lemoine de la rue Gosford apprend que son épouse et lui ont chacun un cancer. L’incrédulité passe rapidement à la colère «On sait maintenant que Monique Dupont, de qui on a acheté la maison a aussi eu un cancer du côlon. C'est un fléau, une calamité ». Caroline Duplain a un cancer du sein et son père militaire est décédé d’un cancer du cerveau. Alexandre, 18 ans, le fils de Chantal Mallette a reçu des dizaines de séances de chimiothérapie et de radiothérapie, «ça ne marche pas!».
« C’est
un
peu
la
panique
chaque
fois
que
mes
deux
adolescents
ont
mal
à la
tête »
s’inquiète
Doris
Fritschmann,
«Nous,
on
est
direct
dans
le
triangle
le
plus
contaminé.» «Je suis profondément choqué de voir qu'autant à la Direction de la santé publique qu'au ministère de l'Environnement, personne ne pense aux humains. Ce ne sont que les préoccupations administratives qui comptent. Ça n'a pas de sens», laisse tomber Jean Bernier. Omerta...le silence! Reportons-nous en décembre 2000; deux résidents se jasent pendant que leur auto est en réparation au garage. Celui qui vit à proximité de l'usine et de la base militaire a fait analyser l’eau de son puits artésien. « Y’a du TCE, c’est dangereux qui disent. Mon puits est condamné. » L’autre lui conseille de le dire à la ville.
La
municipalité
n’est
pas
au
courant;
car
elle
n’opère
pas
d’aqueduc,
dans
ce
cas
se
sont
les
citoyens
qui
doivent
surveiller
la
qualité
de
l’eau
de
leur
puits
artésien.
La
municipalité
contacte
quand
même
la
base
militaire,
et
non
l’inverse,
pour
apprendre
que
la
situation
est
connue
depuis
longtemps.
Un
nouveau
cas
de
condescendance
politique?
Un
silence
obligé
pour
éviter
d’apeurer
la
population
évoquent
certains,
mais
surtout
un
silence
pour
couvrir
des
devoirs
politiques
occultés.
Déjà
en
1978,
le
ministère
canadien
de
l'Environnement
et
la
Défense
nationale
avaient
été
saisie
d’un
rapport
qui
disait :
« déverser
les
eaux
usées
dans
un
étang
perméable
qui
baigne
dans
la
nappe
phréatique
est
inacceptable ».
Pire,
dès
lors,
s’amorce
un
débat
scientifique
pour
étouffer
l’affaire.
À la
demande
de
la
ville
d’étudier
l’état
de
santé
des
citoyens,
le
directeur
de
Santé
publique
Québec,
le
Dr
Henri
Prud’homme
affirme
«Une
étude
menée
sur
un
village
aussi
petit
risquerait
de
créer
inutilement
la
panique».
Son
confrère
le
Dr
François
Desbiens
explique
pour
sa
part
qu'aucun
problème
de
santé
ne
pouvait
être
constaté
avec
les
«faibles»
concentrations
de
produits
relevées
à
Shannon.
Même
s'il
y a
cinq
fois
plus
de
cancers
à
Shannon,
on
s'obstine
à
nier
l'évidence.
Dans la cause du recours collectif, pour démontrer que la contamination de l’eau au TCE a déclenché de nombreux cas de cancers, l’avocat Me Charles Veilleux a fait appel au pathologiste Syd Finkelstein, du Laboratoire RedPath à Pittsburgh. Sa conclusion : « tous les cas de cancers répertoriés dans les zones de contamination élevées sont positifs ». Toutefois, l’Institut national de santé publique du Québec remet en question l’interprétation de ces analyses. Alors il ne faut pas s'attendre d'eux une grande objectivité maintenant que le ministre de la Santé du Québec leur a confié le mandat de faire tout l'éclairage sur cette affaire.
Les
politiciens
se
sont
cachés |