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 Depuis Maastricht (traité de 1992), ce sont les mêmes éléments de langage avariés qui sont servis par les dominants afin de discréditer quiconque ne souscrit pas à 
l'Europe libérale, non pas parce qu’elle est «
Europe », ce que personne ne refuse plus, mais parce qu'elle est «
libérale», ce que beaucoup repoussent. 
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Ce sont les mêmes insultes qui ont été sorties pour les partisans du "
Brexit " – qui n'a toujours pas eu lieu car, méditons cette belle leçon de démocratie, pour sortir 
de l’Europe maastrichtienne, il faut l'autorisation de l'Europe maastrichtienne!  
C'est ainsi que fonctionnent toutes les dictatures : on ne peut en sortir légalement – ce que les Gilets jaunes ont compris...     
 Le système maastrichtien a son clergé.  Il est formé à l'École nationale 
d'administration (ENA), à Sciences-Po (SP), dans les écoles de journalisme, à 
Polytechnique, à l'École normale supérieure.  Pendant leurs années d'études, on 
gave les 
impétrants d'une idéologie qu'ils rabâchent, répètent, réitèrent, 
reproduisent, ressassent ensuite dans tous les endroits où ils sont embauchés : 
grands corps d’État, haute administration, université, journalisme, édition, 
direction des médias, conseil d'État, sans oublier la politique politicienne qui 
est le prolétariat de ces gens-là. 
  Tout ce petit monde a la tête extrêmement bien pleine, mais très mal faite.  Cette 
engeance est formée comme des commandos de 
rhéteurs et de 
sophistes, de 
beaux-parleurs et d'enfumeurs, de 
dialecticiens et de 
casuistes, d'orateurs et 
d'ergoteurs.  Elle produit son meilleur effet dans un conseil d’administration, dans un comité de rédaction ou de lecture, dans un amphithéâtre, dans les 
colonnes d'un éditorial ou dans les réunions des patrons de médias, à l'Assemblée nationale ou au Sénat, dans un conseil des ministres ou dans les 
palais de la République, sur un plateau de télévision ou comme «consultants»
ou 
«experts » sur les chaînes d'information continue ou dans «Le Siècle», un club 
très fermé où l'on mange du "Gilet jaune" à tous les repas...   
Comme les sophistes grecs, cette caste peut soutenir n'importe quelle cause 
parce que leur formation met le paquet sur la forme, rien que la forme, tout sur 
la forme et qu'elle se contente pour tout fond de l'idéologie dominante.  Ces 
gros cerveaux de compétition sont ceux de petits perroquets.
  Bien sûr, ces gens-là estiment que les 
"Gilets jaunes" ne sont pas habilités à 
faire de la politique sous prétexte qu’il faut laisser ces choses-là, trop 
sérieuses pour le peuple, aux experts que sont les instances dirigeantes des 
syndicats et des partis (qui sont de mèche avec les autres puissants contre 
leur base...), et aux élus de tous les échelons de la politique politicienne. La 
démocratie doit être représentative, disent-ils, et non pas directe.  Nous, oui; 
eux, non.
  Or, chacun a pu voir comment le référendum sur le Traité européen qui était 
l'expression de la démocratie directe, bien que largement gagné, a été jugé 
comme nul et non avenu par les députés et les sénateurs qui étaient l'expression 
de la démocratie indirecte. Réunis à Versailles, lieu symbolique s'il en est un, 
il fut dit au Congrès qu'on se moquait de ce que le peuple pensait après qu'on 
lui eut tout de même demandé son avis. Ce coup d'État fut une leçon que le 
peuple a mis dans un coin de sa tête : avec lui, la démocratie indirecte a joué 
au grand jour un jeu contraire à celui de la démocratie véritable qui est 
gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple et non par ses seuls 
délégués. 
	
		
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			Les représentants du 
			peuple ont dit au peuple qu’ils n'avaient que faire de son avis et 
			que, d'ailleurs, ils iraient contre lui.  
			
			Les "Gilets 
			jaunes" sont dans la rue parce qu'ils savent que l'Assemblée 
			nationale et le Sénat sont leurs ennemis puisqu'ils ne les 
			représentent pas sociologiquement ni politiquement.   | 
			
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Le système représentatif, tant qu'il ne sera 
pas intégralement proportionnel, générera une oligarchie, une aristocratie, une 
caste, une tribu qui disposera de tous les pouvoirs: ce ne sera jamais une 
démocratie.  Le pouvoir des élus n'est pas autre chose que la résultante d'un 
calcul tordu avec découpages électoraux effectués par le ministère de 
l'Intérieur et l'Élysée
afin de déboucher sur une bipolarisation de la société: 
non plus entre droite et gauche, mais entre maastrichtiens libéraux de droite et 
de gauche et anti-maastrichtiens de droite et de gauche.  
Aux maastrichtiens 
libéraux de droite et de gauche sont réservés tous les pouvoirs – économiques, 
médiatiques, politiques, sociaux, universitaires, journalistiques ; aux 
anti-maastrichtiens de droite et de gauche, les premiers abandonnent le pouvoir 
verbal de l'opposant avec pour seule perspective de parler à vide 
indéfiniment...
  Avec les "Gilets jaunes" dans la rue, toute cette aristocratie maastrichtienne se 
trouve mise à mal, critiquée, menacée.  Certes, elle dispose de tous les 
pouvoirs, y compris celui d'insulter, de mépriser, de calomnier, de salir le 
peuple sur lequel s'exerce son pouvoir et ne s'en prive pas.  Mais elle voit d’un 
très mauvais œil ce surgissement de velléités de démocratie directe. 
«Ça n'a jamais marché», pérore Christophe Barbier sur
BFM-TV, le samedi 8 décembre 
2018 : ça marche pourtant en Suisse...   
			La notice 
			Wikipédia de ce 
			normalien pas agrégé ayant fait une école 
de journalisme nous apprend ceci : En 2017, il déclare notamment au Journal du 
dimanche : «Se confronter au terrain pollue l’esprit de l’éditorialiste. Son 
rôle est de donner son opinion, d’affirmer ses certitudes, par essence 
improuvables. Afficher avec force ses convictions permet aux lecteurs de s’y 
frotter pour former les leurs.» Et plus loin : «L'éditorialiste est comme un 
tuteur sur lequel le peuple, comme du lierre rampant, peut s'élever.» 
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On comprend qu'il n'ait pas besoin de se confronter au terrain des "Gilets jaunes", 
ce «lierre rampant», afin d'éviter de se polluer l'esprit et de pouvoir affirmer 
en toute objectivité ses certitudes improuvables !   
En passant, on apprend également 
qu’il a composé un rap en l'honneur d'Emmanuel 
Macron...  Christophe 
Barbier est l'un des personnages emblématiques de cette aristocratie qui enjambe 
le peuple. 
	
		
			
			
				
					
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						Un immense gilet jaune sur la façade de la mairie de 
						Morbecque  | 
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Or, quand on va sur le terrain, non content de ne pas s'y polluer l'esprit, on 
se l'éclaire et l'on peut obtenir un certain nombre de certitudes susceptibles 
d’être prouvées.  
J'en veux pour preuve ce tract ramassé dans une rue de Paris et envoyé par un ami.  Il dit ceci :
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  «Nous rentrerons chez nous quand ces mesures seront appliquées 
 1. Nous voulons de la démocratie directe à tous les niveaux.  Nous voulons un 
gouvernement d’union nationale avec une régence d’exception pour éviter que les 
partis politiques, qui sont disqualifiés, n’instrumentalisent notre détresse et 
notre colère.
  2. Nous voulons une baisse de 20% de toutes les taxes et les charges touchant la 
classe moyenne, les travailleurs pauvres et les entrepreneurs.  Baisser ces 
taxes, c’est monter nos salaires.  Nous voulons une action immédiate pour taxer 
ce qui vaut la peine d’être taxé : les
			GAFA
			et les transactions financières.
  3. Nous voulons que la France arrête de vivre au-dessus de ses moyens et arrête 
d’accueillir la misère du monde parce qu’elle est déjà dans la misère avec ses 
millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté.  Nous voulons une 
immigration choisie, qui ne nous détruise pas culturellement.  Nous demandons 
ainsi un retrait du 
			pacte de l’immigration de l’ONU. 
			 4. Nous voulons une relocalisation de toutes les décisions dans les régions, les 
villes et les communes.  L’État et ses fonctionnaires à Paris ne sont pas 
qualifiés pour décider de l’avenir de nos communes.
  5. Nous voulons une 
			sortie de la
			PAC qui corrompt nos agriculteurs en n’allouant 
ses aides qu’aux productivistes et aux empoisonneurs répandant le cancer en 
France.  Nos impôts ne doivent en aucun cas 
			servir à financer Bayer-Monsanto. 
			 6. Nous voulons la création de barrières commerciales pour empêcher l’Allemagne 
de nous vendre des produits fabriqués en Roumanie,
			sous le label «Deutsche Qualität» et d’ainsi détruire nos emplois.
  
			7. Nous voulons le retrait de toutes les aides à la presse pour une vraie 
séparation des pouvoirs médiatiques et politiques.
  8. Nous voulons une action immédiate pour arrêter l’intégration dans l’Europe 
car elle ne se construit que sur la ruine des petites gens.»
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Qui dira qu'il n'y a pas là d'intelligence pratique ?  C'est un véritable 
programme politique.  Il est anonyme, aucune signature, aucune de ces 
propositions ne ressemble à quoi que ce soit de connu chez les 
jacobins.  Il 
est débarrassé du verbiage technocratique ou qui relèverait de la politique 
politicienne.   
	
		
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			C'est simple, clair, net, direct et programmatique : la démocratie directe ; un 
gouvernement d'union nationale constitué en dehors des partis politiques parce 
qu’ils sont discrédités et qu'ils guettent la récupération ; une baisse des 
taxes et des charges pour la population la plus éprouvée ; une augmentation des 
salaires ; une taxation des GAFA et de ceux qui font de l'argent avec l'argent ; 
une politique migratoire rationnelle qui ne soit ni celle de la passoire ni 
celle du mur ; un communalisme et un régionalisme effectifs ; une autre 
politique agricole que celle du productivisme qui fait le jeu des 
multinationales, détruit la planète et intoxique les consommateurs ; 
l'instauration de barrières commerciales qui empêcheraient la concurrence entre 
les États de droit et les États voyous en matière de protection sociale ; le 
retrait des aides à la presse, subventionnée par le contribuable afin de 
l'endoctriner et de le mépriser quand il refuse l'endoctrinement ; une 
séparation des pouvoirs médiatiques et politiques ; l'arrêt de l'intégration 
dans l'État maastrichtien...  |    
J'aurais pu écrire ce tract auquel je ne retranche rien !  Il est la feuille de route de la démocratie directe. C'est sur ce projet positif, concret, dynamique, 
qu'il faut désormais travailler.
  En écrivant mon éloge de la 
démocratie proudhonienne il y a quelques jours, j'ai craint un temps avoir placé la barre un peu haut.  Avec ce tract sans nom ramassé 
dans la rue, je suis désormais bien convaincu que non.  
	
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		Source: Texte du philosophe français
		
		Michel Onfray  | 
		
		 
		Choix de photos, collection de textes, mise en page, références et titrage par :
		JosPublic 
		Mise à jour le 16 décembre 2018  |   
		
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