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Lorsquon veut imposer une décision sans contestation, on a souvent recours à deux arguments qui ne nécessitent pas de justification rationnelle: lurgence de la situation et la nécessité absolue dappliquer cette décision. Cela se vérifie dans de nombreuses situations. Cest vrai de ces petits matins où lenfant rechigne à mettre sa tuque et ses mitaines alors quon doit aller le conduire à lécole : dépêche toi on est en retard et tu nas pas le choix de thabiller chaudement car il fait froid.
Pas le temps
dexpliquer les risques dengelures
ni de justifier limportance de
lécole dans le développement dun
être humain. Le même principe est
appliqué lors de
« rationalisations » dans
lindustrie privée: la concurrence
internationale nous oblige à réduire
les salaires afin de réduire les
coûts et demeurer concurrentiels; il
faut le faire avant quil ne soit
trop tard et risquer la fermeture de
lentreprise.
Les problèmes du Québec ne sont pas conjoncturels, ils sont structurels; si rien nest fait dès maintenant, le Québec fonce directement dans le mur et risque de se retrouver dans la situation de la France ou, pire, de celle de la Grèce. Le ministre et ses collègues enfoncent le clou presque quotidiennement. Leur ton catastrophiste, contrit et professoral, frisant la condescendance illustre aisément quil sagit là dune stratégie rhétorique de vérité. Nous navons pas le choix, voici les faits, il y a urgence et lheure est grave, répètent-ils en substance. Sauf que non. Lexpression favorite de Martin Coiteux lorsquil était professeur était « les faits sont têtus ». Effectivement, ils le sont. Examinons-les. La situation nest pas catastrophique. À en croire le premier ministre ou M. Coiteux le déficit « structurel » du Québec est gigantesque. On lance le chiffre de 2,35 milliards de dollars de déficit prévu au dernier budget, sans le mettre en perspective. Or, pour la large majorité des Québécois, ce chiffre lancé en lair ne dit strictement rien. Je vous dirais que le déficit est de 25 milliards de dollars, quil y aurait de fortes chances que vous me croyiez sur parole. Parce quà telle hauteur, ces nombres perdent leur perspective, lorsquon ne les manie pas quotidiennement.
Il sagit donc, en quelque sorte, dune épargne visant à rembourser une dette. Conséquemment, le « vrai » déficit est dun peu plus de 1 milliard de dollars. Sur des dépenses totales denviron 97,5 G$, cela représente à peine plus de 1% des dépenses de lÉtat. Si on ramène ces données à des proportions auxquelles nous sommes plus familiers, si le budget de lÉtat était de 50 000$, le déficit représenterait un montant annuel de 538$. Dépenser systématiquement davantage que ce quon reçoit comme revenu est certes un problème. Mais ce 1% de déficit ne correspond en rien au niveau catastrophique que voudrait nous laisser croire le ministre Coiteux et ses collègues. Il ny a pas durgence. Selon M. Coiteux et ses collègues, il y aurait urgence dagir maintenant parce que la situation des finances publiques se serait détériorée à ce point rapidement que le feu brûle la maison de la cave au grenier. Or, là aussi, nen déplaise à M. Coiteux, les faits sont têtus. Lui et ses collègues aiment bien répéter que la dette du Québec a augmenté de 65 milliards de dollars depuis 2003. Mais ce quils omettent de mettre en perspective par rapport à ces chiffres dapparence vertigineux, cest que la dette du gouvernement du Québec nest pas plus importante en 2014 quelle ne létait en 2003 par rapport à la taille de son économie la seule mesure rationnelle de son poids. Elle était en mars 2003 de 54% et elle était en mars 2014 dexactement la même proportion, 54%. Cela, malgré le fait que le Québec, comme toutes les économies industrialisées, a traversé la plus grave crise économique du 20e siècle après celle des années 1930.
Qui plus est, les données publiées
par le ministère des finances en
novembre 2014 montrent que les
finances du gouvernement du Québec
sassainissent delles-mêmes. Pour
les cinq premiers mois de lexercice
financier en cours, les revenus de
lÉtat ont crû de 3% alors que les
dépenses
nont connu quune augmentation de
1,7%. Résultat, le déficit réel
(hors paiements au Fonds des
générations) nest actuellement que
de 149 millions de dollars, sur un
budget de près de 100 milliards,
soit 0,18%.
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Constatons avec réalisme que le service de la dette cest-à-dire ce que nous devons rembourser chaque année est important: à hauteur de 11 milliards de dollars par année sur un budget de 97 G$. Cest un montant important, certes. Mais peut-on le remettre en perspective par rapport à nos actifs? Le parallèle est simple: vous avez des revenus de 45 000$ par année et une hypothèque de 200 000$. Mais votre propriété a une valeur sur le marché de 300 000$. Votre situation financière est saine, malgré ce lourd endettement. Cest exactement la même situation pour nos finances publiques.
Le problème majeur, cest de ne pas comprendre que le développement économique, social, culturel et politique passe nécessairement par une délibération démocratique et non pas par des discours de vérité que nous assènent les ministres du gouvernement Couillard à la triste image de ce que fait le gouvernement Harper à Ottawa depuis 10 ans.
Est élu à Québec un
gouvernement néoconservateur qui ne
vise quun objectif, et cet objectif
est politique: la réduction de la
taille de lÉtat sans proposer à son
peuple un projet de société.
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